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Commission Charbonneau: «Goyette prend ses ordres du moineau», dit Michel Arsenault (VIDÉO)

Commission Charbonneau: «Goyette prend ses ordres du moineau», dit Michel Arsenault (VIDÉO)

L'ex-président de la FTQ Michel Arsenault a donné une explication pour le moins alambiquée des doutes qu'il avait entretenus à l'égard de l'ex-directeur général de la FTQ-Construction Richard Goyette sur ses liens avec le mafieux Raynald Desjardins, un proche de Jocelyn Dupuis.

Un texte de Bernard Leduc

La commission Charbonneau a présenté une écoute électronique du 17 février 2009 dans laquelle Michel Arsenault affirme à Louis Bolduc, qui siège au Fonds, avoir appris de Tony Accurso et de Ken Pereira que le successeur de Jocelyn Dupuis à la direction générale de la FTQ-Construction, « [Richard] Goyette, prend ses ordres du moineau ».

Le mot, a-t-il convenu, désignait Raynald Desjardins, dont il venait juste d'apprendre de Ken Pereira l'implication dans Carboneutre avec Jocelyn Dupuis.

Puis, dans une conversation du 5 mars 2009 avec son prédécesseur à la tête de la FTQ, Henri Massé, il laisse tomber : « Desjardins a le contrôle sur cette gang-là aussi. J'ai pas de trace de ça, mais c'est ce que j'entends ».

La commission avait déjà fait entendre cet automne une autre écoute dans laquelle Michel Arsenault affirme que M. Goyette lui aurait avoué avoir demandé la permission à Raynald Desjardins pour briguer le poste de directeur général, qu'il remportera en novembre 2008.

« Je ne pense pas qu'il prenait ses ordres de Desjardins » - Arsenault

Mais devant la commission, Michel Arsenault soutient en fait n'avoir jamais cru ou eu de preuves que Richard Goyette, dauphin désigné de Jocelyn Dupuis, prenait ses ordres de Raynald Desjardins : « J'ai jamais pensé une seconde que Goyette était dans le crime organisé ».

« Je suis pas un chef de police, j'étais un chef syndical. Je ne peux pas congédier et suspendre sur la foi de simples rumeurs », a-t-il poursuivi, ajoutant d'ailleurs que ses fonctions ne lui en donnaient pas le pouvoir.

Il ajoute par ailleurs avoir été réconforté par l'enquête faite par le ministère de la Sécurité publique sur M. Goyette, au moment de son accession à la CSST, qui avait démontré qu'il n'avait aucun antécédent judiciaire.

Il a cependant précisé que jamais Raynald Desjardins n'a eu d'aide du Fonds de solidarité et que, dans la foulée du scandale des comptes de dépense de Jocelyn Dupuis, les finances de la FTQ-Construction étaient sous surveillance.

« On a surveillé Richard Goyette de très près » a-t-il fait valoir, expliquant qu'il avait eu son autorisation pour vérifier les dépenses de la FTQ-Construction dès novembre 2008. Il soutient d'ailleurs que son conseiller politique, Gilles Audette les avaient lui-même vérifiés à l'occasion.

Des écoutes ont cependant démontré que c'est seulement en mars 2009 que Richard Goyette a signé la lettre autorisant la FTQ à faire de telles vérifications. La lettre, dit M. Arsenault dans l'écoute, a été antidatée du mois de novembre.

Pereira en maître chanteur...

Il a au passage cassé du sucre sur le dos de Ken Pereira, qui lui a pourtant révélé le pot aux roses sur les liens de Raynald Desjardins avec Jocelyn Dupuis ainsi que Carboneutre, une entreprise dans laquelle les deux hommes étaient associés et pour laquelle ils ont tenté, en vain, d'avoir de l'argent du Fonds.

Il soutient que Ken Pereira, qui l'inondait d'allégations, avait, de fait, un passé criminel, qu'il lui laissait des messages de menace au téléphone ou encore qu'il aurait exigé une prime de 400 000 $ et une job à la FTQ-Construction.

Michel Arsenault soutient qu'il n'avait aucune idée qui était Raynald Desjardins avant que Ken Pereira ne l'en informe, entre la fin 2008 et le début 2009.

« J'étais sous l'impression que ce gars-là était un délégué syndical. Il [Pereira] m'en avait plusieurs fois. À un moment donné, il m'a dit : ''t'as pas l'air de réaliser qui que c'est''. Il le traitait de « capo », il était dans la famille... »

Aussi, lorsque Ken Pereira lui apporte quelques mois plus tard une carte professionnelle prouvant l'implication de ce dernier dans Carboneutre, un dossier que Jocelyn Dupuis le pressait de défendre au Fonds, il sait clairement à qui il a affaire.

Une entente entre les clans ennemis parrainés par Arsenault

Michel Arsenault a par ailleurs admis qu'il avait fait une entente avec Richard Goyette et Jean Lavallée, pour que le premier accède au C. A. du Fonds et que le second garde son poste de président du C. A. de la SOLIM malgré son départ de la présidence de la FTQ-Construction, le tout en marge des élections à la tête de la FTQ-Construction en novembre 2008.

Ainsi, espérait-il, la paix reviendrait entre les clans Lavallée et Dupuis, dont la querelle déchirait leur syndicat.

Mais il refuse de croire que l'enjeu de leur lutte, qui se traduira par des élections à la FTQ-Construction en novembre 2008, était uniquement l'accès à un siège au C. A. du Fonds, comme l'a soutenu le syndicaliste Ken Pereira. Il soutient que leur chicane était davantage liée à l'accession au poste de vice-président de la FTQ.

Le président de la FTQ n'est pas « le grand patron » de la FTQ-Construction

Michel Arsenault estime, à la lecture des médias et au regard de propos entendus à la commission, que le rôle et les pouvoirs du président de la FTQ sont mal compris.

« Tu peux pas donner d'ordre, ta job c'est de convaincre », souligne M. Arsenault, qui a précisé que tous les 37 locaux affiliés, dont la FTQ-Construction, sont liés à la FTQ sur une base volontaire. Ils sont donc libres de décider qui embaucher, qui renvoyer, ou encore comment gérer leur budget.

Ce sont « des gens sur qui tu n'as aucune autorité hiérarchique », le président de la FTQ n'est pas le « grand patron », a-t-il insisté.

Il a donc soutenu que c'est en se fondant sur sa seule autorité morale qu'il a approché Jocelyn Dupuis, en septembre 2008, pour le convaincre de quitter ses fonctions en raison de ses dépenses somptuaires comme directeur général de la FTQ-Construction.

« J'ai demandé à Dupuis de s'en aller, je lui ai dit que c'était indéfendable », a insisté M. Arsenault, qui avait été mis aux faits de ses dépenses extravagantes par Ken Pereira.

Le 17 septembre, Jocelyn Dupuis et Jean Lavallée lui annonçaient qu'ils quittaient respectivement leurs fonctions de directeur général et de président de la FTQ-Construction, ouvrant la voie aux élections de novembre 2008.

M. Lavallée, soutient-il, ne lui a jamais précisé pourquoi il avait décidé lui aussi de partir, sinon qu'il était « fatigué » : « J'ai peut-être posé des questions, mais j'ai jamais eu de réponse ».

« Si tu veux survivre longtemps comme président de la FTQ, mets-toi pas le nez dans la politique de tes affiliées à moins qu'on te le demande ou à moins que la chicane est prise entre deux clans, affirme M. Arsenault : laisse les forces s'affronter (...) et tu travailles avec le gagnant. »

Arsenault fréquente toujours Accurso

L'ex-président de la FTQ Michel Arsenault (2007-2013) a admis d'entrée de jeu entretenir toujours des liens avec l'entrepreneur Tony Accurso.

« C'est pas un ami que je vois toutes les semaines, mais on se voit à l'occasion », a expliqué celui qui était aussi président du C.A du Fonds de solidarité FTQ, mentionnant notamment avoir soupé avec lui peu après sa retraite en novembre 2013.

M. Arsenault s'est par ailleurs emporté en fin de journée lorsque la commissaire France Charbonneau a soulevé son séjour sur le yacht de Tony Accurso qui avait défrayé la manchette en 2009.

Michel Arsenault juge injuste le traitement qui lui a été réservé à la suite de cet épisode alors que le président de la Caisse de dépôt, qui a lui séjourné chez Paul Desmarais père dans Charlevoix, s'est en sorti sans un blâme.

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