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Des plaques d'immatriculation dans la hotte du nouvel an grec

Des plaques d'immatriculation dans la hotte du nouvel an grec

Mardi, veille du Nouvel an, une administration grecque a fait autant le plein que les grands magasins: le service des immatriculations où se pressent les automobilistes venus rendre les plaques d'un véhicule dont ils ne veulent plus ou ne peuvent plus payer les taxes.

Lambros Anagnostopoulos aurait bien passé les dernières heures de 2013 ailleurs que dans la cohue d'un centre des impôts du centre d'Athènes, mais cet employé quinquagénaire entendait aussi profiter jusqu'au dernier moment de la modeste Opel à laquelle il s'apprête à renoncer.

Les plaques d'immatriculation du véhicule qu'il tient sous le bras, comme des dizaines d'autres automobilistes autour de lui, ne tarderont pas à atterrir sur les étagères du bureau "voitures" du service des impôts du quartier de Zographou.

Il ne suffit pas, en Grèce, de s'abstenir d'acheter une vignette pour en être quitte avec la taxe de circulation, il faut aussi dévisser les plaques de sa voiture et les remettre en mains propres à l'administration.

C'est la formalité qu'avait accomplie l'ex-ministre des Transports, Michalis Liapis, invoquant "la crise", lorsqu'il s'est défait des immatriculations de son 4x4. Mais l'ancien cadre du parti conservateur au pouvoir, à la tête d'une fortune immobilière, s'est cru plus malin en continuant à circuler avec de fausses plaques.

Lambros Anagnostopoulos payait jusqu'ici 240 euros de taxe d'immatriculation, et c'est en bus qu'il se rendra désormais "en province, deux, trois fois par an, dans le village familial". A propos de l'affaire Liapis, il se plaint : "Si je m'étais fait prendre dans cette situation, je serais en prison".

Arrêté mi-décembre lors d'un contrôle routier, l'ancien ministre, dont le cas n'en finit pas d'alimenter révolte et sarcasme dans l'opinion, a été condamné lundi à quatre ans de prison, mais avec sursis.

"La peine la plus lourde possible", explique doctement Pavlos Tsamados, un avocat, en prenant les personnes de la file d'attente à témoin, "mais ce n'est qu'un moyen de d'apaiser le peuple, c'est de la publicité, pas de la justice".

Venu rendre les plaques de sa BMW, il reconnaît qu'il n'est pas lui-même "le plus malheureux" et qu'il continuera de circuler au volant de sa moto ou de sa "Mini Cooper".

"Mais il ne faut pas croire que les avocats sont épargnés par la crise, lance-t-il. Ces deux dernières années, mon cabinet a perdu 40% de son activité. Cette année, j'ai deux gros clients, des entreprises, qui ont déménagé à l'étranger".

La reprise économique annoncée par le gouvernement pour 2014, il assure ne pas en voir le moindre signe.

L'avocat économisera ainsi les 660 euros de taxe de circulation que lui coûte sa berline, "plus l'assurance, plus l'entretien".

Selon le ministère des Finances, quelque 1,3 million d'automobilistes ont dévissé les plaques de leur véhicule depuis 2009 et le début de la crise, dans un pays qui comptait cette année-là 7,7 millions d'immatriculations.

Baris Lambis, qui s'est assis pour attendre son tour, ses plaques sur les genoux, compte également économiser "plus de mille euros par an" mais assure que sa démarche est différente: "Je peux encore payer les frais de cette voiture mais je considère que cet argent sera plus utile autrement".

Une réflexion que saisit au vol un ingénieur pour exprimer son refus "de continuer à donner de l'argent à l'Etat". Sa luxueuse Lexus lui coûte tous les ans "le prix d'un petit loyer". Il roulera désormais en Volkswagen Polo.

Les deux frères Giorgos et Kosmas, ébénistes venus chacun rendre les plaques de leur véhicule, sont loin de ces considérations. Leur atelier a licencié ses deux salariés, ne vend presque plus de meubles. Désormais, ils iront à pied.

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