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Le SCRS blâmé pour sa conduite de l'affaire Abdelrazik

Le SCRS blâmé pour sa conduite de l'affaire Abdelrazik

Le Service canadien du renseignement de sécurité a dévoilé de manière inappropriée des renseignements personnels et classés secrets concernant le Montréalais Abousfian Abdelrazik alors qu'il était détenu au Soudan, a soutenu jeudi l'organisme de surveillance du SCRS.

Dans son rapport annuel, le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS) affirme aussi que le SCRS a fourni par la suite à des services alliés des informations inexactes et exagérées dans le dossier de M. Abdelrazik.

L'homme de 51 ans avait été arrêté, sans qu'il n'y ait de mise en accusation, au cours d'un voyage au Soudan en 2003 pour visiter sa mère malade. Alors qu'il était en détention dans ce pays, il a été interrogé par le SCRS relativement à de présumés liens avec des extrémistes.

Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, qui a déposé jeudi son rapport annuel au Parlement, n'a trouvé aucun indice pouvant laisser croire que le SCRS avait demandé aux autorités soudanaises d'arrêter ou de détenir Abousfian Abdelrazik. Mais dans les mois ayant précédé son arrestation, le service canadien de renseignement a relayé à ses alliés à l'étranger toute nouvelle information recueillie dans le cadre de l'enquête sur M. Abdelrazik.

Le Comité de surveillance a aussi déterminé que les autorités soudanaises ont cru, à tort, que le Canada et le SCRS appuyaient leur décision d'arrêter et de détenir le Montréalais en visite dans son pays d'origine.

De plus, le SCRS et le ministère des Affaires étrangères - les deux agences canadiennes les plus impliquées dans l'affaire - étaient parfois en contradiction l'une par rapport à l'autre en ce qui a trait à leur travail consulaire et de renseignement.

En apprenant la mise en détention de M. Abdelrazik au Soudan, le SCRS « aurait dû être plus proactif » à l'égard du ministère des Affaires étrangères concernant ce qu'il savait, « afin d'assurer une réponse du Canada mieux documentée et coordonnée » dans cette affaire, indique le rapport.

M. Abdelrazik, qui nie tout lien avec le terrorisme, soutient avoir été torturé par des responsables du renseignement soudanais au cours de deux périodes de détention, mais le Canada affirme n'avoir rien su de ces abus allégués.

Le Comité de surveillance a affirmé que l'affaire s'étalant sur plusieurs années soulève de nombreuses questions.

La liste noire de l'ONU

D'abord, bien que le SCRS ait suivi les règles dans sa requête pour M. Abdelrazik à la suite de sa première mise en détention, le Comité a estimé que l'agence avait dévoilé des renseignements personnels et classés secrets « de manière inappropriée et en violation de ses propres règles ».

Puis, au milieu de 2004, lors des préparatifs pour une possible libération du Montréalais, le SCRS a fourni à des alliés des informations mises à jour sur M. Abdelrazik - qui comprenaient, selon le Comité, des éléments « inexacts et exagérés ».

Finalement, le SCRS a conservé une « quantité substantielle de renseignements » dans ses bases de données courantes concernant des personnes n'étant pas visées par cette enquête.

Quelques jours après la seconde libération de M. Abdelrazik en juillet 2006, son nom est apparu sur une « liste noire » du Conseil de sécurité des Nations unies l'empêchant de prendre l'avion pour rentrer au Canada.

Il avait alors trouvé refuge à l'ambassade canadienne à Khartoum, mais Ottawa avait refusé de lui accorder un document de voyage pour retourner chez lui. Le gouvernement canadien a dit par la suite que M. Abdelrazik devait avoir un billet d'avion valide avant qu'un passeport puisse lui être délivré.

M. Abdelrazik, qui est père de quatre enfants, est finalement revenu à Montréal en juin 2009. Le même mois, la Cour fédérale a conclu que le SCRS était complice dans la détention du Canadien en 2003.

M. Abdelrazik poursuit aujourd'hui le gouvernement canadien et l'ancien ministre des Affaires étrangères Lawrence Cannon.

Le Comité de surveillance indique qu'aucune recommandation n'émane de son enquête puisque des changements substantiels ont déjà été apportés au fonctionnement du SCRS depuis 10 ans. Il mentionne tout de même que des leçons importantes peuvent être tirées de cette affaire.

En plus, de nouvelles informations risquent fort d'émerger de documents en possession d'autres agences fédérales, ainsi que des procédures devant les tribunaux, a indiqué le Comité.

« Le récit d'Abousfian Abdelrazik n'est pas encore écrit dans son entièreté », affirme-t-on.

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