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Iran : le président Hassan Rohani veut entamer les pourparlers sur le nucléaire

Iran : espoirs de paix dans le discours d'Hassan Rohani
Iranian President Hassan Rouhani speaks during a address and discussion hosted by the Asia Society and the Council on Foreign Relations at the Hilton Hotel in midtown Manhattan, Thursday, Sept. 26, 2013, in New York. (AP Photo/John Minchillo)
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Iranian President Hassan Rouhani speaks during a address and discussion hosted by the Asia Society and the Council on Foreign Relations at the Hilton Hotel in midtown Manhattan, Thursday, Sept. 26, 2013, in New York. (AP Photo/John Minchillo)

Nul n'est besoin d'avoir un doctorat en diplomatie pour éprouver un certain scepticisme envers la campagne de paix rhétorique du président iranien Hassan Rohani.

Quelle que soit la signification de son arrivée sur la scène mondiale, quelles que soient ses inclinations naturelles, il opère à l'intérieur d'un système autocratique dirigé par une clique isolée qui justifie ses violations des droits de l'homme par le dogme religieux. Son discours s'est avéré constructif, mais sa faculté à transformer ces mots en actions dépend du consentement de leaders ayant dédaigné pendant des décennies la majeure partie de la communauté internationale, faisant de l'Iran une nation paria où le peuple est privé de droits et de prospérité.

Pourtant, lorsqu'on est assis dans la même pièce qu'Hassan Rohani, comme j'ai eu la chance de le faire jeudi soir à New York, on voit se rapprocher l'opportunité de désamorcer l'une des plus grandes menaces de la planète.

Le scepticisme reste de mise, mais il faudrait être bien cynique pour ne pas entendre le président iranien fraîchement élu décrire les raisons historiques d'une telle situation sans discerner la possibilité de futurs échanges plus cordiaux entre l'Iran et ses adversaires. A moins d'être efficacement immunisé contre les dangers géopolitiques, on ne peut décemment pas renoncer à la moindre option de sortie de l'impasse iranienne.

"J'ai basé ma campagne sur la modération et largement gagné les élections," a déclaré Hassan Rohani, reprenant un thème qui a semblé lui tenir à cœur tout au long de ses apparitions de la semaine aux Nations Unies. "En vertu du mandat qui m'a été confié par l'électorat, je me vois dans l'obligation de placer mon travail sous le signe de la modération."

Moins d'une heure plus tard, son ministère des Affaires Étrangères, Javad Zarif, est venu faire le rapport de son entretien avec son homologue américain John Kerry -- première étape d'une série de discussions visant à désamorcer les tensions au sujet du programme nucléaire iranien.

"Notre entretien a été très satisfaisant," a déclaré Javad Zarif, ajoutant : "Je suis optimiste."

Les experts suivant de près Hassan Rohani et sa quête éloquente d'une amélioration des relations avec les États-Unis et l'Europe n'ont pas appris grand chose lors de la rencontre de jeudi soir organisée par le Conseil des Affaires Étrangères et l'Asia Society dans un hôtel du centre-ville de Manhattan. Il a réitéré ses promesses d'un Iran sans velléités nucléaires militaires, et qualifiant son programme nucléaire de "pacifique." Il s'est montré favorable à des discussions prolongées avec l'administration Obama et les dirigeants européens en vue d'un accord nucléaire qui permettrait d'éviter le conflit.

Mais la simple existence d'un tel rassemblement est extraordinaire, tout comme le spectacle d'un président et d'un religieux iraniens salués par les applaudissements enthousiastes d'un parterre de 300 membres en complet gris de l'élite américaine. C'était un peu comme un lot consolation pour la poignée de main qui n'a jamais eu lieu avec Barack Obama.

Satisfait

Rohani satisfait à ce sens de la grandeur historique, inscrivant son mandat comme partie intégrante d'une tendance mondiale.

"Une nouvelle ère a commencé à travers le monde, comme elle a commencé en Iran," a-t-il délcaré. "Les élections qui ont eu lieu et le vote des Iraniens en faveur de la modération, de la sagesse, de l'espoir et de la prudence a posé les bases d'un climat nouveau, où l'on s'engagerait et interagirait avec le monde entier."

Le prédécesseur d'Hassan Rohani, Mahmoud Ahmadinejad, était connu pour entretenir une relation conflictuelle avec l'Occident, surtout à travers son refus de reconnaître l'Holocauste. Cette semaine, Hassan Rohani a relancé la controverse sur ce point sensible en déclarant à Christiane Amanpour, de CNN, qu'il était du ressors des historiens de mesurer " les dimensions de l'Holocauste." Certains y ont vu une façon subtile de nier l'Holocauste , soulignant l'hypothèse suggérée que le nombre de victimes aurait été surévalué. D'autres ont préféré voir en la condamnation de Rohani du "crime que les Nazis ont commis contre les Juifs" un point de vue rafraîchissant par rapport aux positions passées de l'Iran.

Quelle que soit l'analyse que l'on fait de son discours, Hassan Rohani représente clairement une nouvelle ambition iranienne: il cherche à remporter l'approbation internationale. Tandis qu'il montait à la tribune, jeudi, les mains calmement posées sur les genoux dans un contraste saisissant avec l'agitation de ses prédécesseurs, le rictus amusé qu'il arborait parfois semblait transmettre l'impression qu'il y prenait du plaisir.

En quête

Il a défini la quête d'un accord nucléaire comme le projet de toute personne sensée, tout en déclarant que s'y opposer serait une tentative stupide de mettre à bas l'intérêt global en favorisant ses ambitions propres.

"En tant que dirigeants nous devons nous élever au-dessus de la politique mesquine faire le travail qui nous incombe plutôt que de suivre les différents intérêts et groupes de pression dans nos pays respectifs," a-t-il dit. "Nous devons contrer ces groupes d'intérêt ici, aux Etats-Unis, et là-bas. Leur objectif est de maintenir l'Iran dans son statut de zone de conflit. Ils cherchent à dévier l'attention internationale des problèmes les impliquant."

Il n'a pas cité ces intérêts particuliers, mais il n'en avait pas besoin.

Il parlait d'Israël et de son Premier ministre Benyamin Netanyahou, qui a traité Hassan Rohani de loup déguisé en agneau, suggérant que toute négociation avec l'Iran est source de danger.

Il faisait aussi référence aux alliés infaillibles d'Israël à Washington – des républicains du Congrès qui voient en ces débuts de pourparlers entre Obama et l'Iran une nouvelle opportunité de dépeindre le président comme faible et naïf.

Il parlait enfin d'un autre allié majeur des États-Unis, l'Arabie Saoudite, dont la monarchie islamique sunnite a toujours fait son possible pour mettre des bâtons dans les roues de Chiites président l'Iran.

Chacun de ces intérêts particuliers est enclin à mettre en garde contre le manque de sincérité de l'exercice de séduction d'Hassan Rohani. Malgré les signes évidents montrant que l'Iran est prêt à renoncer à l'arme nucléaire, les mots de Rohani doivent être vus comme autant de ruses visant à alléger les sanctions économiques tout en dressant une barrière entre Israël et les États-Unis.

Bien que les gros titres faisant état du discours d'Hassan Rohani cette semaine se soient concentrés sur son appel au dialogue avec les États-Unis et l'Europe, le président iranien a invariablement souligné la volonté de son pays de poursuivre son avancée nucléaire, exploitant la technologie pour l'énergie tout en renonçant à la construction d'armes. Mais bon nombre d'experts émettent des doutes quant à es intentions réelles, surtout au vu des agissements passés de l'Iran.

Néanmoins, même si les raisons de douter sont légion, mais il existe autant de raisons de montrer un optimisme prudent. On peut très bien imaginer que les hommes à la tête de l'Iran sont arrivés à la conclusion que le statut de paria international n'est pas une base saine pour connaître un meilleur avenir.

Du fait de son isolement et du poids des sanctions économiques, l'Iran a le plus grand mal à satisfaire aux besoins élémentaires. Le pays foisonne de jeunes gens éduqués qui ne parviennent pas à trouver un emploi, et qui sont de plus en plus connectés au reste de la planète grâce au web et à la télévision, ce qui signifie qu'ils sont conscients de ce qu'ils n'ont pas. S'ensuit une frustration, prélude à un renversement de gouvernement.

Quand le présent est pénible et le futur n'apporte aucun espoir d'apaisement, le changement devient non seulement logique, mais aussi impératif. L'attitude de Rohani est peut-être simplement une conséquence de cette prise de conscience collective, avec au premier plan la Garde révolutionnaire iranienne.

Ou peut-être pas. On ne sait pas. On ne peut pas savoir tant qu'on n'a pas vu les tenants et les aboutissants. Mais ne pas savoir n'est pas une excuse pour ne pas s'engager.

Voilà une opportunité extraordinaire qui doit être saisie, ne serait-ce que pour la raison suivante: le statu quo est inacceptable. Le risque continuel de confrontation militaire dans une région du monde aussi souvent dépeinte comme une poudrière exige qu'on poursuive les négociations en cours.

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