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Les suspects de l'UPAC ont versé beaucoup d'argent au Parti libéral du Canada

Les suspects de l'UPAC ont versé beaucoup d'argent au Parti libéral du Canada
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Le Parti libéral du Canada a récolté la grande majorité des dons versés par les individus et les entreprises maintenant soupçonnées de corruption au Québec durant la période ayant précédé le resserrement des règles régissant les dons aux formations politiques, le scandale de l'industrie québécoise de la construction et l'exil des libéraux dans l'opposition.

Au sommet de son pouvoir il y a une décennie, le Parti libéral était une véritable machine à ramasser de l'argent. Mais certains de ses donateurs sont maintenant dans l'eau chaude.

Selon une enquête réalisée par La Presse Canadienne, les libéraux ont reçu 85 pour cent, soit 1,86 million $, des quelque 2,18 millions $ versés entre 1993 et 2011 par des dizaines de personnes et de compagnies qui ont depuis été accusées à la suite d'enquêtes menées par l'Unité permanente anticorruption (UPAC).

Des données fournies d'Élections Canada pour cette même période, marquée par la présence prolongée du Parti libéral au pouvoir, montrent que des sommes plus modestes ont aussi été versées aux autres formations politiques.

L'actuel Parti conservateur du Canada a touché 39 945 $ alors que ses prédécesseurs, le Parti progressiste-conservateur ainsi que l'Alliance canadienne/Parti réformiste, ont respectivement recueilli 211 274 $ et 15 120 $. Le Bloc québécois a pour sa part récolté 54 579 $.

Ni le Nouveau Parti démocratique (NPD), ni le Parti Vert n'ont reçu de contributions provenant d'individus ou d'entreprises faisant présentement l'objet d'accusations.

Les dons versés par les personnes et les sociétés aujourd'hui incriminées par l'UPAC ont commencé à chuter après 2003, avec l'adoption de nouvelles lois limitant les contributions aux partis politiques, d'abord par les libéraux de Jean Chrétien puis par les conservateurs de Stephen Harper.

En 2009, alors que le scandale de la corruption dans le milieu de la construction commençait à faire surface au Québec, ces suspects ont pratiquement cessé de faire des dons. Certains témoins à la Commission Charbonneau ont expliqué que la pression exercée par les médias et la police avait poussé l'industrie à revoir sa façon de faire.

Si les contributions ont considérablement diminué au cours des dernières années, elles n'en permettent pas moins d'établir une tendance claire en matière de financement politique: l'argent suit le pouvoir.

Le Parti libéral, qui a amassé plus d'argent que tous ses adversaires réunis avec un ratio de 47 pour 1 en 2003, a rapidement perdu son avantage.

Après leur arrivée au pouvoir, les conservateurs ont éclipsé les libéraux auprès des donateurs lors d'une année, et se trouvaient au coude-à-coude avec eux, une autre.

La Presse Canadienne a examiné les dons versés par les 102 individus accusés par l'UPAC au Québec. Cette enquête a permis de découvrir que près de la moitié de ces personnes, soit 45, avaient fait des contributions enregistrées à des partis politiques entre 1993 et 2011. Les données disponibles sur le site d'Élections Canada commencent en 1993.

Le site montre également que des 13 entreprises ciblées par l'UPAC, 10 ont fait des dons à des formations politiques fédérales entre 1993 et 2006. Les contributions des entreprises au fédéral ont été limitées en 2003 et interdites en 2006.

L'enquête de La Presse Canadienne a également répertorié les dons versés à des partis fédéraux par des entrepreneurs en construction et des firmes de génie-conseil au sein desquelles certaines des 102 personnes incriminées occupaient des postes influents.

À la lumière de ces résultats, le NPD a réclamé qu'Élections Canada lance une enquête afin de déterminer si ces contributions avaient fait grimper le prix des contrats accordés par le gouvernement fédéral ou si les donateurs avaient obtenu des contrats en échange de leurs dons.

"C'est extrêmement louche que les libéraux et les conservateurs soient une fois de plus impliqués avec des gens qui ont eu des pratiques douteuses dans le passé", a déclaré le député néo-démocrate Alexandre Boulerice. "Nous voulons savoir s'ils ont obtenu des traitements de faveur de la part soit des libéraux, soit des conservateurs en échange de cet argent-là. Pour nous, c'est encore une fois la confirmation que les libéraux et les conservateurs, c'est du pareil au même, et qu'il est temps de faire de la politique autrement."

Dans un courriel, le Parti conservateur a pour sa part rappelé que son premier geste important à son arrivée au pouvoir en 2006 avait été l'adoption de la Loi fédérale sur la responsabilité.

"Nous n'acceptons que les dons faits par des individus qui respectent la limite légale", a indiqué le porte-parole de la formation, Fred DeLorey. "Nous avons interdit les contributions versées par les compagnies et nous avons imposé une limite stricte pour les dons personnels."

La porte-parole du Parti libéral, Andrée-Lyne Hallé, a également réagi par courriel.

"Je peux vous dire que les contributions au Parti libéral ont été faites dans le respect de la loi", a-t-elle écrit jeudi. "Nous n'avons pas d'autres commentaires sur cette question."

Le député du Bloc québécois André Bellavance a affirmé en entrevue avec La Presse Canadienne que son parti avait reçu très peu de dons de la part de compagnies et qu'il pensait que les contributions individuelles avaient été faites par conviction politique.

Il a ajouté que, de toute façon, sa formation politique ne pourrait jamais être au pouvoir et donc dans une position lui permettant d'offrir des faveurs.

En ce qui concerne les suspects qui ont donné au Bloc québécois par le passé, M. Bellavance a fait valoir que personne n'aurait pu prévoir que ces donateurs seraient un jour sur le banc des accusés.

"Si le don est tout à fait légal selon Élections Canada, nous l'acceptons. Nous ne pouvons pas présumer que la personne, 10 ans plus tard, se retrouvera dans une situation problématique", a souligné M. Bellavance, qui est député bloquiste depuis 2004.

La Commission Charbonneau n'a pas le mandat de déterminer s'il y a eu corruption sur la scène fédérale. Mais M. Bellavance a soutenu qu'il faudrait être naïf pour croire que des activités illégales n'ont jamais eu lieu à Ottawa.

"S'il y a des gens malhonnêtes à une place, je ne vois pas pourquoi ils n'y en aurait pas à d'autres places", a-t-il conclu.

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