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Festival de jazz 2013: Champion de l'audace (PHOTOS)

Festival de jazz 2013: Champion de l'audace (PHOTOS)
David Kirouac

Maxime Morin, alias, DJ Champion, n’aura pas fait les choses à moitié pour ce premier concert °1, inspiré directement de son album paru à la fin mai. Dans le cadre du Festival international de jazz de Montréal, il a offert une prestation audacieuse à haut degré d’intensité, à la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, samedi soir.

Accompagné de ses G-Strings et de l’orchestre I Musici, Champion s’était lancé le défi de faire vivre harmonieusement une sorte d’ensemble débalancé de différents styles musicaux. Rencontre improbable pourrions-nous dire. Qu’à cela ne tienne, le rock, le classique, le jazz, le hip-hop, voire le métal ont été alliés pour la soirée.

Une proposition unique à l’image de cet artiste québécois qui à la réputation de faire à sa façon, sans compromis. À la fois poétique, doux, moderne, orchestral et fougueux (mais loin des sonorités électro dont il nous avait habitués), ce spectacle témoigne de la transformation, ou du moins d’une autre sensibilité. Plus de Morin et moins de Champion, comme nous l’avions affirmé dans un texte lié à une récente entrevue avec le compositeur à propos du disque.

Le voyage

Pour ouvrir le bal, Champion propose la première chanson de l’encodé intitulée 40#@%&! Une magnifique pièce sur laquelle tout flotte. Sorte de fresque musicale classique qui inspire «le drame à l’italienne». L’interprétation des 15 musiciens de l’orchestre de chambre, dirigé par Jean-Marie Zeitouni, est délicate et contemplative.

Viendra ensuite Ursula et ses ambiances de trame sonore. Juste après, Dat Train changera totalement l’ambiance. Sur une basse caverneuse programmée au rythme régulier qui rappelle des battements de cœur, Pierre-Philippe Côté (dit Pilou) apparaît pour interpréter cette chanson plus rock et passablement atmosphérique. L’ensemble enchaînera avec A Dog and A Goat et ses cuivres enveloppants, dont tous les arrangements ont été créés par le compositeur et tromboniste Jean-Nicolas Trottier.

Arrive les paroles « ready or not » et « take it all » du morceau Requiem Dem, chanté par Pilou qui se veut torturé et à fleur de peau. La voix est angoissée, paniquée, rageuse. Belle maîtrise de son outil. C’est électro-jazz orchestral et trip hop sur les bords. Debout devant sa table de contrôle située au centre de la grande scène, Champion envoie quant à lui des beats pendant que flottent les mélodies produites par les instruments à cordes des membres de I Musici. C’est la crise qui se prépare. Les guitares électriques (4 gars) et la basse du collectif des G-Strings grondent. On dirait une tempête qui s’en vient.

En cours de route, les quelque 2500 spectateurs (approximatif) avalés jusqu’à maintenant par la performance générale manifeste sa satisfaction.

Du rap symphonique

La chanteuse de Random Recipe, Fab, apparaîtra à ce moment pour chanter avec Pilou Every New Now, une pièce résolument rap. Changement significatif dans le ton installé depuis le début. Ça bouge. C’est plus direct. Plus carré. Pas mal. Lentement, on reviendra aux atmosphères électro-rock, mais pour une offre plus accrocheuse et dansante. Les bons rythmes hypnotiques s’accélèrent pour culminer dans une finale tragique d’opéra.

Sans arrêter, les guitares se lancent dans de bons éclats rock. Quelque part dans ces arrangements planants passeront deux autres compositions de l’album °1,Grand Prix et Montecristo, cette dernière offrant des rythmes légèrement latins : autre série de riffs mélodiques et originaux aux guitares électriques. Quasi disco. L’intensité monte. Chaque musicien des G-Strings balance sa partition. C’est complexe, mais ça se tient. Finalement, les guitares s’estompent pour laisser la place aux cordes. C’est ample, doux, presque cathédral. Génial.

Après Je t’aime puis la très pesante Half a Mile on entendra No Love Enough, un peu plus lumineuse, malgré le gros beat sale de basse synthétique. L’interprétation du chanteur est aussi plus « optimiste ».

Ce sera de courte durée, car à Alive Again, succès du disque précédent Resistance (2009), Pilou se mettra à courir dans tous les sens sur des arrangements lourds et efficaces. La voix est passionnée, même déchaînée. Tout le monde est debout et bouge dans la salle. On tombe dans le post-rock à la limite du punk. Excellent délire combiné avec une autre chanson populaire No Heaven du premier disque de Champion, paru en 2005.

Mise à nu sympathique

À la fin du concert, Maxime Morin viendra jouer une pièce très éclectique à la guitare acoustique. Composition très différente des autres morceaux de l’album °1, chanson qu’il avait qualifiée de «mise à nue» au printemps. On parle de °356 - Ain’t Got A Friend, un morceau folk-blues-garage bien gras, fait volontairement un peu croche.

Irritant, parfois suffoquant, mais toujours avec des bouffées d’air pour avancer plus loin, ce spectacle est d’une originalité certaine. Rempli d’étincelles de génie, de folie et truffé de savants arrangements. La plupart du temps charmé, on en sort épaté (et le sourire en coin) par autant d’affirmations.

Une très cool proposition dans la programmation du Festival de jazz 2013.

EN IMAGES:

Festival de jazz: 6 juillet 2013

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