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L'affaire Snowden : une « patate chaude » internationale

L'affaire Snowden : une « patate chaude » internationale

Pendant que le secrétaire d'État américain, John Kerry, s'agite en menaçant la Chine et la Russie, ces derniers tentent de refiler à un autre pays la « patate chaude » que représente le dossier de l'ex-consultant de la CIA Eward Snowden, accusé d'espionnage aux États-Unis.

Le chef de la diplomatie américaine soutient que Snowden a « trahi » son pays et que la seule destination qui devrait lui être autorisée est les États-Unis. « S'il a été délibérément autorisé à embarquer à bord d'un avion, cela serait décevant », a déclaré M. Kerry depuis New Delhi, en Inde, en répondant à une question sur le rôle de la Chine dans la fuite de M. Snowden. « Il y aurait de ce fait et sans aucun doute un effet et un impact sur les relations, ainsi que des conséquences », a-t-il ajouté.

La fuite d'Edward Snowden constitue un revers en matière de politique étrangère pour Barack Obama, qui tente depuis 2009 de se rapprocher de Moscou et, depuis plus récemment, de Pékin.

M. Kerry tire maintenant sur la Chine et la Russie, qui profitent toutes deux des fuites dont M. Snowden est à l'origine. Les allégations d'espionnage informatique contre les États-Unis, contenues dans les révélations de Snowden, ont permis à Pékin de placer la diplomatie américaine sur la défensive après avoir été régulièrement montré du doigt en cette matière au cours des derniers mois.

L'agence officielle Chine Nouvelle est allée jusqu'à traiter Washington de « plus grand voyou de notre temps », un ton devenu inhabituel dans le langage officiel chinois. Profitant de ce revirement diplomatique, la Chine tente toutefois de refiler la gestion du reste du dossier à un tiers puisqu'il risquerait de déstabiliser les relations sino-américaines.

En privé, les responsables américains pensent aussi que les autorités de Pékin ont demandé à laisser partir Snowden pour transmettre à Moscou la « patate chaude » qui aurait pu dégénérer en querelle diplomatique.

Un nouveau chapitre conflictuel avec la Russie

Quant à la Russie, un entretien avec un espion américain constitue une sorte de cadeau. « Les services russes de renseignement et de contre-espionnage ont beaucoup de questions à poser à une personne aussi informée », avait déclaré dimanche soir une source au sein des services de sécurité russes. « Je n'ai aucun doute que cela sera fait. »

« Je suis sûr que Snowden aura une soirée bien remplie et une nuit sans sommeil », avait-il ajouté pendant que l'Américain se trouvait apparemment dans la zone de transit de l'aéroport de Moscou-Cheremetievo, où il en a profité pour demander l'asile politique à l'Équateur.

« Snowden présente beaucoup d'intérêt pour le FSB (services secrets russes). Il peut donner des informations sur les aspects techniques de l'interception des données », a indiqué de son côté le spécialiste des questions de sécurité Pavel Felgenhauer. « Un débriefing en présence de spécialistes techniques prend beaucoup de temps », a précisé M. Felgenhauer, en précisant que ces entretiens pourraient se dérouler dans un futur pays d'accueil.

Interrogé sur le rôle de la Russie, M. Kerry a rappelé que les États-Unis ont transféré, au cours des deux dernières années, sept prisonniers que réclamait la Russie. « Je pense que la réciprocité et l'exécution de la loi sont assez importants », a déclaré M. Kerry.

Contrairement aux relations avec la Chine, celles des États-Unis avec la Russie se détériorent depuis plusieurs mois. « Les relations entre la Russie et les États-Unis sont tellement mauvaises que je ne sais pas ce qui peut encore les assombrir », a indiqué le responsable de l'Institut des États-Unis et du Canada Viktor Kremeniouk. Le dossier Snowden s'ajoutera ainsi aux différends qui opposent les deux pays: le conflit syrien, le nucléaire iranien et les droits de la personne en Russie.

Recherché par les États-Unis pour avoir divulgué des informations sensibles sur les opérations américaines de surveillance électronique, Snowden est arrivé dimanche à Moscou en provenance de Hong Kong, où il s'était réfugié. Il aurait quitté Hong Kong pour la Russie, mais personne ne l'a vu depuis. Le mystère plane maintenant autant sur sa destination que sur l'endroit où il se trouve.

Les États-Unis ont révoqué son passeport et demandé que cet ancien collaborateur de la CIA et de l'Agence nationale de sécurité (NSA) soit empêché de poursuivre sa route.

Un cas de liberté d'expression, selon Quito

La demande d'asile à l'Équateur déposée par Edward Snowden relève d'une affaire de « liberté d'expression », a estimé son ministre des Affaires étrangères, Ricardo Patino.

L'Équateur en est encore à examiner le dossier, mais M. Patino estime que l'informaticien américain est « persécuté » et il s'interroge sur les allégations de trahison à son endroit. M. Patino soutient que le dossier Snowden sera analysé sous l'angle du respect des droits de la personne. Le ministre Patino estime, par ailleurs, que le programme de surveillance américain constitue une violation des droits du monde entier.

Le site WikiLeaks fondé par Julian Assange, qui a lui-même obtenu l'asile à l'ambassade de l'Équateur à Londres pour échapper à une extradition, a annoncé que Snowden était « en route pour la République d'Équateur par un chemin sûr afin d'obtenir l'asile ».

Le chef de la diplomatie équatorienne a toutefois déclaré que seul Moscou sait où se trouve l'ancien sous-traitant de la NSA.

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