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Les garderies privées en grève ce matin
Baby girl waving hand and standing up in crib
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Baby girl waving hand and standing up in crib

Environ 300 des 655 garderies privées subventionnées du Québec poursuivent leurs moyens de pression et ferment leurs portes aujourd'hui pour protester contre les compressions de 15 millions de dollars imposées par le gouvernement Marois.

Avec Pascal Poinlane

Le bras de fer entre les garderies privées subventionnées et le gouvernement se poursuit avec, en toile de fond, une guerre de chiffres.

Québec fait valoir que les garderies privées subventionnées enregistrent des profits substantiels. L'État compte en garder une partie, étant donné les subventions accordées. Les coupes exigées représentent en moyenne 21 000 $ par garderie privée de 60 places, sur un budget d'environ 675 000 $ par établissement.

Pascal Poinlane suit la manifestation en direct :

D'où viennent les chiffres?

Le ministère de la Famille base ses calculs sur les déclarations fiscales produites chaque année par les 655 garderies privées subventionnées de la province. Quatre-vingts pourcent d'entre elles ont enregistré des profits l'an dernier. Le total : 52 millions de dollars en bénéfices nets, ce qui correspond à des profits moyens par garderie de 98 000 $ pour l'année fiscale 2011-2012. Mais dans son calcul, le ministère exclut les garderies déficitaires, environ 20 % d'entre elles.

D'autre part, le gouvernement a calculé les surplus cumulés des garderies subventionnées, qui augmentent chaque année. Encore une fois, les calculs fournis par le gouvernement excluent les établissements déficitaires.

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Une compilation imparfaite

L'Association des garderies privées du Québec (AGPQ) réplique que les calculs du gouvernement ne tiennent pas compte de la réalité. L'association fait valoir que les garderies déficitaires sont exclues du calcul des bénéfices. De plus, les profits accumulés comprennent généralement le fonds de pension du propriétaire de la garderie, ainsi que les montants à prévoir pour entretenir l'édifice.

En entrevue téléphonique, Sylvain Lévesque, président de l'Association des garderies privées du Québec (AGPQ), avoue cependant qu'il n'a pas en main les données financières de ses propres membres, qui sont confidentielles. Les chiffres sont compilés par l'État et conservés par le ministère de la Famille.

L'AGPQ demande donc l'intervention d'un médiateur, et exige l'examen externe des données financières des garderies et des CPE par une firme comptable.

Des manifestations malgré les amendes prévues

À L'entrée du conseil des ministres ce matin, Nicole Léger a réitéré qu'il y aurait des sanctions pour les garderies qui sont fermées aujourd'hui. Elle a aussi indiqué que les inspecteurs étaient sur le terrain.

Malgré cela, l'AGPQ garde le cap. « C'est la première fois à vie que les garderies privées tiennent une journée de grève », a indiqué Sylvain Lévesque, président de l'Association des garderies privées du Québec (AGPQ), en entrevue à RDI.

Des milliers de parents seront donc privés du service de garde pour leurs enfants. À Montréal, les manifestants ont prévu marcher jusqu'aux bureaux du ministère de la Famille. À Québec, des propriétaires, des éducateurs et des parents iront manifester devant l'Assemblée nationale ce midi.

M. Lévesque soutient avoir l'appui des parents des garderies membres de son association. « On était 10 000 dans la rue, on l'a fait un samedi pour éviter de fermer et ça a été une fin de non-recevoir de la part du gouvernement », déplore-t-il. Il estime ainsi ne plus avoir de recours que la journée de grève.

Les manifestants prévoient utiliser des casseroles et des carrés bleus, disant vouloir tourner en dérision la participation de Pauline Marois, alors dans l'opposition, à une manifestation tenue dans le cadre de la crise étudiante au printemps 2012, carré rouge au veston et casseroles à la main.

« Elle s'est mis un carré et une casserole. C'est ce qu'on lui dit nous aussi. Ce qu'on veut lui passer comme message, c'est qu'elle, comme citoyen, elle a eu le droit de le faire. Est-ce qu'elle a été mise à l'amende, Pauline Marois? Non », a déclaré le président de l'AGPQ, Sylvain Lévesque.

Les subventions du privé

Le président de l'AGPQ estime que les compressions de 15 millions de dollars que veut imposer le gouvernement au réseau de garderies privées constituent un recul sur l'entente décrochée l'an dernier.

Les garderies privées avaient alors réussi à négocier une augmentation de leurs subventions pour atteindre l'équité salariale avec les CPE. « Le gouvernement met la hache là-dedans par acharnement idéologique envers le réseau privé », déplore-t-il.

Les garderies privées doivent concurrencer les salaires consentis aux éducatrices de CPE puisqu'il y a une pénurie de cette main-d'oeuvre au Québec, selon M. Lévesque. Or, une diminution de subventions implique une perte de revenus et le gouvernement détermine la tarification des garderies privées puisque bien que dites privées, elles demeurent subventionnées. Les garderies ne peuvent donc pas refiler la facture aux parents.

M. Lévesque soutient que le gouvernement souhaite réduire les subventions des garderies privées pour financer le réseau de CPE.

Le président de l'AGPQ propose une autre solution pour éviter les compressions. Il suggère de transférer 13 000 places en développement dans 50 futurs établissements du réseau de CPE vers le réseau privé. Comme les propriétaires de garderies privées paient la construction des bâtiments, le gouvernement économiserait ainsi plus des 15 millions.

Le gouvernement maintient le cap

La semaine dernière, la ministre Léger a brandi la menace de sanctions face à une éventuelle grève des garderies privées, disant que ces dernières allaient perdre une moyenne de 2500 $ si elles ferment leurs portes aujourd'hui, une pénalité financière qui ira croissant si les établissements prolongent leur grève.

Si le gouvernement décide d'imposer des sanctions, l'AGPQ affirme que les garderies défendront le fait qu'elles ne font qu'utiliser l'une des cinq journées pédagogiques mises à leur disposition pour fermer leurs portes, disant qu'il n'est pas « question de céder au chantage ».

La ministre martèle quant à elle que les solutions proposées par l'AGPQ pour éviter les compressions ne sont pas réalistes, précisant que les coupes exigées représentent en moyenne 21 000 $ par garderie privée de 60 places, sur un budget d'environ 675 000 $ par établissement.

Quatre autres journées de grève sont prévues ultérieurement, dont une le 30 mai prochain.

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