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Erik Izraelewicz, directeur des rédactions du Monde, est décédé

Erik Izraelewicz, directeur des rédactions du Monde, est décédé
AFP

Erik Izraelewicz, directeur des rédactions du Monde depuis février 2011, est décédé ce mardi soir. Il avait été hospitalisé en fin d'après-midi après avoir été victime d'un malaise. Le journaliste de 58 ans était également vice-président du conseil de surveillance des hebdomadaires Télérama et Courrier international.

Avant de prendre les rênes du Monde, Erik Izraelewicz a fait toute sa carrière dans les rubriques économiques et dirigé les rédactions des deux quotidiens économiques français, Les Echos d'abord, La Tribune ensuite.

Une main de fer dans un gant de velours

Ceux qui l'ont côtoyé en dressent le portrait d'un excellent journaliste, sérieux et intègre, et d'un homme aux abords timides, ou du moins discrets, mais doté d'un solide sens de l'humour. Il parvenait toujours aux objectifs qu'il s'était fixés en privilégiant toujours la manière douce, sans se précipiter mais sans dévier non plus de son cap. Une main de fer dans un gant de velours. Les mails qu'il envoyait à ses collaborateurs pouvaient tout autant être des félicitations pour un bon article que des messages dévastateurs. Mais difficile d'en connaître la teneur avant de l'ouvrir puisque dans les deux cas, il avait pris l'habitude d'écrire "Hello" en objet du mail...

Erik Izraelewicz avait forgé son sens de l'actualité grâce à une expérience de plus de 20 ans en presse quotidienne et flairait les sujets qui allaient monter tout au long de la journée. Fidèle, il n'hésitait pas à s'entourer des journalistes avec lesquels il avait travaillé dans ses précédents journaux et à féliciter ceux dont il appréciait le travail:

Conscient de la perte de vitesse structurelle de la presse papier et de l'importance croissante d'Internet, il avait amorcé, à La Tribune comme au Monde un virage des journalistes vers le bi-média et s'était attelé à la refonte du site Internet de ces deux journaux. Depuis peu, il s'était également mis sur twitter pour promouvoir les articles du groupe Le Monde, féliciter publiquement un journaliste ou commenter l'actualité, comme par exemple au sujet du psychodrame à l'UMP:

L'hommage de François Hollande

L'Elysée a rapidement envoyé un communiqué de presse dans lequel François Hollande rend hommage au directeur des rédactions du Monde:

C'est avec une profonde tristesse que j'apprends le décès brutal d'Erik Israelewicz. Depuis 2011, il dirigeait les rédactions du «Monde» dans la tradition d'indépendance de ce grand journal tout en ayant la volonté de conduire son indispensable mutation. Il y avait pleinement réussi.

Je garderai le souvenir d'un économiste réputé, d'un professionnel reconnu et d'un homme aussi exigeant que généreux.

Sa bienveillance vis-à-vis des personnes ne l'empêchait jamais d'être intraitable dès qu'il s'agissait de juger leurs actes ou de commenter leurs choix. La France perd un journaliste de grand talent, respecté de tous.

J'adresse à sa famille, à ses proches et à l'ensemble des collaborateurs du «Monde», dont je mesure l'immense chagrin, mes très sincères condoléances.

Louis Dreyfus, président du directoire du groupe Le Monde (dont Le HuffPost fait partie) a adressé à ses collaborateurs un message dans la soirée:

Aujourd'hui est une triste journée pour le Monde. Pris d'un malaise au journal, Erik a été hospitalisé en fin d'après-midi à l'hôpital de la Salpétrière. En dépit des premiers soins qui lui ont été prodigués au journal, puis de l'intervention du corps médical, Erik est mort en tout début de soirée.

C'est pour nous tous, pour le journal, pour notre collectivité et plus largement pour la profession, une très grande perte. Erik faisait partie de ces rares professionnels qui savaient allier professionnalisme, talent, indépendance et rigueur. En plus de toutes ses qualités, il avait une rare capacité d'écoute et un sens de l'humour qui rendait notre quotidien plus léger. C'est aujourd'hui un ami que nous perdons.

En cette heure triste, je souhaitais partager avec vous ce chagrin.

Louis Dreyfus, président du directoire du groupe Le Monde

Pierre Bergé, actionnaire du Monde :

Journaliste économique avant tout

Ce natif de Strasbourg au brillant parcours académique (HEC, Centre de Formation des Journalistes, docteur en économie) a commencé sa carrière à l'Expansion avant de participer à la création, en 1985, de la Tribune.

A partir de 1986, il a passé près de 15 ans au Monde, où il a notamment dirigé le service économique et occupé les postes de correspondant à New York en 1994 puis de rédacteur en chef en 1996.

Entre 2000 à 2007, il intègre le quotidien économique Les Echos en tant qu'éditorialiste, puis de directeur adjoint de la rédaction, puis de directeur de la rédaction. Opposé à la reprise du quotidien par Bernard Arnault, il rejoint son principal concurrent, La Tribune, en tant que directeur de la rédaction.

Il relance en 2008 le quotidien économique repris par Alain Weill (BFM, RMC, 01 Net...) dans l'optique d'en faire un quotidien économique grand public, avec de nouvelles rubriques comme "Green Business" ou "BRIC" (pays émergents) et même une rubrique sport, culture et WE, une parution le samedi et un magazine (La Tribune & Moi) et un prix de lancement à 1 euro, mais se heurte au début de la crise financière qui fait chuter les recettes publicitaires.

Le clip de lancement de la nouvelle formule de La Tribune:

Et le reportage de BFM lors du bouclage de la nouvelle formule:

Il quitte La Tribune en août 2010, peu après la décision d'Alain Weill de céder ses parts à la directrice générale du quotidien, Valérie Decamp.

Le 10 février 2011, l'assemblée générale de la Société des rédacteurs du Monde (SRM), avait validé sa nomination au poste de directeur du Monde par 74,25 % des parts présentes ou représentées. Depuis, il s'était attelé à de nombreux chantiers au sein du célèbre quotidien, avec le lancement du magazine M Le Monde, de nouveaux cahiers hebdomadaires (sciences, éco...), le relookage du quotidien ou encore la poursuite d'une réorganisation bi-média de la rédaction.

Durant l'élection présidentielle, l'édito de la rédaction du Monden'a pas hésité à sortir de la neutralité pour dénoncer la campagne très à droite de Nicolas Sarkozy:

La dernière nouvelle formule du Monde a été lancée il y a très peu de temps, le 19 novembre dernier, avec une nouvelle Une, l'ouverture du journal par l'événement du jour (une rubrique qu'il avait également mise en avant à La Tribune), une séquence "Culture & Styles" et une page de dessin hebdomadaire animée par Plantu.

"Le journal papier a un avenir, à condition qu'il se transforme. C'est, forts de cette conviction et avec le soutien de nos actionnaires que, tout en accélérant nos applications sur le Net, nous avons aussi travaillé depuis dix-huit mois à la rénovation de notre quotidien - pour qu'il soit toujours davantage le vôtre." expliquaient alors Erik Izraelewicz et Louis Dreyfus

La première Une de la nouvelle formule:

Il a également suivi de près une nouvelle formule de Courrier International, autre magazine du groupe Le Monde (dont Le HuffPost fait partie).

Auteur de plusieurs ouvrages et chroniqueur télé

Erik Izraelewicz était également l'auteur de plusieurs ouvrages, dont Le Capitalisme zinzin (Grasset, 1999), Monsieur Ni-Ni, l'économie selon Jospin (Robert Laffont, 2002), Quand la Chine change le monde (Grasset, 2005) et L'Arrogance chinoise (Grasset, 2011).

Il collabore également quotidiennement, en tant que directeur de la rédaction de La Tribune, avec BFM (appartenant également à Alain Weill) pour des chroniques économiques:

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