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Tuerie de Norvège: un an après, revivez minute par minute la tragédie et la trajectoire d'Anders Breivik

La tuerie de Norvège, un an après, minute par minute
Avec AFP

Un an après les attaques les plus meurtrières perpétrées sur son sol depuis la Seconde Guerre mondiale, la Norvège commémore ce dimanche la mort des 77 victimes d'Anders Behring Breivik.

De cette tragédie qui a marqué le monde et traumatisé ce paisible pays scandinave, les Norvégiens savent à peu près tout, tant le tueur s'est montré disert et "coopératif" tout au long de son procès dont le verdict sera connu le 24 août prochain. Mais certaines zones d'ombre demeurent. En dépit d'un procès exemplaire, le doute demeure sur l'équilibre psychologique de l'assassin.

Déclaré psychotique par une première expertise officielle ensuite contredite par une contre-expertise, celui qui reconnaît les faits tout en plaidant non-coupable tient à être déclaré pénalement responsable pour ne pas voir son idéologie invalidée par une pathologie mentale.

Les magistrats norvégiens sont longuement revenus sur le déroulé de ce 22 juillet fatidique pour tenter de se faire une idée précise de la psychologie de tueur de masse.

Minute par minute, heure par heure.

MATINÉE: "AUJOURD'HUI, JE VAIS MOURIR"

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A une heure indéterminée, Anders, Breivik se réveille le 22 juillet au matin dans l'appartement d'Oslo de sa mère où il a passé la nuit. Mais c'est depuis une ferme norvégienne, qu'il a louée en mai 2011 à Rena, à 2h20 de route d'Oslo qu'il s'est procuré des engrais pour confectionner une bombe de 950 kilos, entreposée dans un van. Interrogé lors de son procès sur ses pensées à la veille de la tuerie, Breivik indique : "je n'ai pas pensé à grand chose parce que j'étais exténué d'avoir travaillé toute la journée". En se réveillant le 22 au matin, le jeune homme raconte: "je me suis dit, aujourd'hui je vais mourir".

12H51: "CE SERA MON DERNIER POST"

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Depuis l'ordinateur de sa chambre, Anders Breivik met la dernière main à son manifeste et au carnet de bord qu'il a consacré à la préparation de la tuerie du 22 juillet. Si les 1500 pages du document sont essentiellement consacrées à la "Déclaration européenne d'indépendance - 2083", le manifeste contient également un "Carnet de bord des chevaliers du temple - réflexions personnelles et expériences durant les différentes phases de préparation" et retrace le cheminement intime, politique et psychologique du jeune homme. "Je crois que ce sera mon dernier post. On est maintenant le vendredi 22 juillet, 12 h 51. Bien à vous", écrit-il avant de poster son manifeste sur Internet.

Dans la vidéo de 12 minutes postée sur Youtube, il dénonce l'émergence de la culture du marxisme, la colonisation islamique et pose en combattant en armes. La vidéo sera retirée le lendemain de la tragédie.

13H: UNE VOITURE DE FUITE GARÉE NON LOIN DES MINISTÈRES

C'est peu après que Breivik passe à l'action. Son plan, dévoilé tout au long de son procès est minutieux. L'individu a prévu une voiture pour prendre la fuite qu'il va garer à proximité du quartier des ministères. Pendant les audiences, la cour a diffusé une photo de Breivik le 22 juillet, en pull rayé et sous un parapluie prenant le taxi pour rentrer chez sa mère. Ce n'est qu'après qu'il va garer sa camionnette au pied même de la tour abritant les bureaux du Premier ministre travailliste Jens Stoltenberg, alors absent. A l'intérieur, l'extrémiste a placé une bombe de 950 kg, fabriquée à base d'engrais, de diesel et d'aluminium.

Les images des caméras de surveillance montrent Breivik au volant de sa camionnette blanche, se garant à 15h17 devant l'entrée du bâtiment du ministère. A 15h18, on le voit partir, vêtu d'un uniforme de policier. Il affirme s'être changé derrière son van.

Lors de son procès, Anders Breivik explique avoir apposé sur la vitre du véhicule une enseigne de pressing destiné à expliquer la forte odeur de produits chimiques qui se dégage de la camionnette. Retardé par des embouteillages, Breivik prend tout de même le temps de prévenir une jeune maman accompagnée de son enfant de s'éloigner du quartier ministériel, relate le journaliste norvégien Trygve Sorvaag.

15H26: LA BOMBE EXPLOSE

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Agent de sécurité, Tor Inge Kristoffersen expliquera pendant le procès comment il a vu une camionnette blanche se garer juste devant la tour gouvernementale et procédé les vérifications d'usage avec les caméras de vidéosurveillance. "Quand j'ai zoomé sur la plaque d'immatriculation, la voiture a explosé", a témoigné M. Kristoffersen qui se trouvait alors dans le centre opérationnel situé au sous-sol du bâtiment.

A 15h26, les caméras de surveillance du quartier ministériel du centre-ville d'Oslo enregistrent le bruit d'une gigantesque détonation. Le souffle de l'explosion fait voler en éclats la plupart des vitres de la rue. Spécialiste des explosifs dans une agence gouvernementale, Svein Olav Christensen, expliquera que la bombe de Breivik avait dégagé une énergie comparable à l'équivalent de 400 à 700 kg de TNT.

Mais contrairement à ce qu'il espérait, Anders Breivik n'est pas parvenu à faire s'écrouler la tour de plus de 70 étages. Lui qui espérait "détruire tout le gouvernement" a fait huit victimes civiles qui passaient dans le quartier. Très vite, le quartier est bouclé, mais Anders Breivik est déjà en route.

15H20 - 16H50: BREIVIK PASSE À LA DEUXIÈME ÉTAPE DE SON PLAN

C'est à bord de son véhicule de fuite qu'il apprend que son plan initial a échoué. Breivik entend à la radio que la tour gouvernementale ne s'est pas écroulée. Son but n'était pas d'atteindre des civils affirmera-t-il. "Il n'y a aucun magasin dans le coin, pas de café et pratiquement pas de civils qui passent dans le quartier", explique Breivik à la barre. L'opération est donc un "échec" raconte-t-il à son procès, et c'est alors qu'il décide de passer à la deuxième phase de son plan.

Il lui faudra un peu plus d'une heure pour rejoindre l'île de Utoeya, à une quarantaine de kilomètres de Oslo, où se déroule le camp d'été du Parti travailliste. A bord de son véhicule, un fusil Ruger et un pistolet Glock semi-automatique.

16H57: BREIVIK EMBARQUE POUR UTOEYA

Arrivé aux abords du lac qui entoure l'île d'Utoeya, Breivik prend contact avec les organisateurs du camp d'été du Parti travailliste sur l'île pour qu'ils lui envoient le ferry. Afin de ne pas éveiller de soupçons, il affirme mener des investigations suite à l'attentat qui vient de se dérouler dans le centre-ville de Oslo.

Il embarque à bord du chaland MS Thorbjoern à 16h57 pour l'île d'Utoeya sur laquelle plus de 570 personnes font la fête.

17H21, LA TUERIE COMMENCE

Vingt minutes plus tard, le jeune intégriste débarque sur l'île où il est accueilli. Quatre minutes plus tard, il tue trois personnes: la première victime est Trond Berntsen, puis Monica Elisabeth Boesei, la "matriarche" du camp, et Rune Havda.

La fusillade qui va suivre va durer 74 minutes.

17H23: LA CHASSE À L'HOMMEbreivik

Agissant de manière désordonnée, ANders Breivik se met en chasse de ses victimes, tirant àtout va dès qu'il rencontrait quelqu'un, achevant même ses victimes d'une balle dans la tête. Son plan, dit-il, était de tuer toutes les personnes "au dessus de 18 ans" mais qu'il était "difficile" de voir leurs visages. " Je ne suis pas un meurtrier d'enfants", précisera-t-il lors de son procès.

A l'origine, Breivik avait prévu d'embarquer bien plus tôt. Son objectif était de se trouver sur l'île d'Utoeya à 11 heures pour assassiner Gro Harlem Brundtland, ancienne ministre travailliste. "Le plan était de décapiter Brundtland pendant que je lisais un texte. Et poster la vidéo sur Internet", expliquera-t-il.

L'expédition n'en est pas moins meurtrière et expéditive.. Entre 17h23 et 17h26, Breivik tue treize personnes. Les jeunes tentent de s'échapper à tout prix. Beaucoup se cachent dans la cafétéria, d'autres escaladent les rochers à flanc de falaise. Malgré l'éloignement de la cote, certains tentent de se sauver à la nage.

17H27: "VENEZ VITE, CA TIRE TOUT LE TEMPS"

Très vite, des jeunes tentent de contacter la police. L'appel de Renate Taarnes, 22 ans, a été enregistré puis diffusé lors du procès. "Venez vite... Ça tire tout le temps", supplie la jeune femme qui a survécu à la tuerie. "Hein' Qu'est-ce que vous dites'", répond le policier incrédule. "Je suis quasiment sûre que plusieurs personnes sont blessées. C'est la panique ici", s'écrie-t-elle.

Une rafale d'une dizaine de tirs retentit alors et le silence se fait sur la ligne. "Vous êtes toujours là?", demande le policier. "Oui", souffle la jeune fille, et l'on n'entend plus que le son de sa respiration et des coups de feu dans le lointain.

A 17h40, un peloton d'urgence est envoyé depuis Oslo pour intervenir sur l'île.

17H52: UNE PATROUILLE DE POLICE ATTEND UN BATEAU POUR ACCEDER A L'ILE

Alors que la tuerie se poursuit sur l'île, une patrouille de police est déjà sur les rives du lac. Problème, l'absence de bateau les empêche de faire la traversée.

Un premier bateau est avancé mais menace de couler sous le poids des hommes et des équipements.

Au loin, les rafales s'enchaînent. 189 douilles seront ramassées. Piégés sur une île de 0,12 km², des jeunes se jettent dans les eaux glaciales du lac. Alertés par les coups de feu, les occupants d'un camping voisin tentent, avec leurs bateaux, de les secourir et essuient aussi des tirs. "Vous allez tous mourir, marxistes", hurle le tueur qui a absorbé un mélange énergisant illicite à base d'éphédrine, de caféine et d'aspirine.

18H00: LE TUEUR PRÊT A SE RENDRE

Vers 18H00, Breivik contacte la police et propose une première fois sa reddition. Mais le coup de fil est interrompu. Dans les sept minutes qui suivent, Breivik tue huit nouvelles personnes. Vers 18H13, Breivik tue encore 14 personnes.

18H24: BREIVIK RAPPELLE LA POLICE

Après avoir fait de nouvelles victimes, Breivik rappelle la police à 18H24. "Maintenant que l'opération est finie, je souhaite me rendre", affirme-ti-l en se présentant poliment comme le "commandeur dans le mouvement de résistance norvégien". L'appel est à nouveau interrompu. Dans la foulée, il tue cinq autres personnes.

Peu avant, le peloton d'urgence est arrivé à 18h09 sur les rives du lac, mais peine lui aussi à trouver un bateau pour rejoindre l'île. L'équipe parvient enfin à embarquer à bord d'un modeste bateau pneumatique qui rend l'âme.

18H27: ANDERS BREIVIK EST ARRÊTÉbreivik

Il est 18h25 lorsque les policiers débarquent sur l'île où règne un silence de mort. Les cadavres jonchent les rives d'Utoeya et les survivants sont recroquevillés sur eux-mêmes. Certains attendront encore près d'une heure avant d'être libérés par l'arrivée de la police.

Deux minutes après leur arrivée, les policiers appréhendent Anders Breivik. Il n'opposera aucune résistance à son arrestation.

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