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Le contre-interrogatoire de Jacques Duchesneau se poursuit

Contre-interrogé
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COUVERTURE EN DIRECT - Jacques Duchesneau est de retour à la barre des témoins pour une cinquième journée à la commission d'enquête sur l'industrie de la construction.

L'ex-patron de l'Unité anticollusion (UAC) continue d'être contre-interrogé sur les conclusions du rapport qu'il a remis au ministre des Transports Sam Hamad en septembre 2011, et sur l'ensemble des déclarations fracassantes qu'il a faites depuis le début de son témoignage.

Les avocats de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec (ACRGTQ), Me Denis Houle, du procureur général du Québec, Me Benoît Boucher, et du Parti québécois, Me Estelle Tremblay, ont déjà indiqué qu'ils auront des questions à poser au premier témoin-vedette entendu par la commission.

Les deux employés de l'UPAC qui accompagnaient Jacques Duchesneau depuis le début de la semaine, l'agente de renseignements Annie Trudel et l'enquêteur Martin Morin, ne seront pas à la barre des témoins pour la totalité du contre-interrogatoire. Les avocats ont informé la juge France Charbonneau qu'ils réservaient leurs questions à l'ex-policier.

Mardi, Me Denis Houle a été implacable avec Jacques Duchesneau. L'avocat de l'ACRGTQ ne s'est pas gêné pour mettre en doute la validité des conclusions du rapport. Il s'est interrogé sur le bien-fondé de la décision de Jacques Duchesneau de remettre son rapport à la journaliste Marie-Maude Denis et a même suggéré que le témoin faisait de la politique.

« Vous arrivez dans presque tous les cas avec un seul exemple, on s'entend? Des fois, on ne sait pas d'où ça vient, mais de là à généraliser pour parler de corruption, dans l'ensemble de l'industrie, moi personnellement, je trouve que vous y allez fort », a lancé Me Houle à Jacques Duchesneau, qui lui a rétorqué: « Et moi, de vous entendre banaliser une situation, je pourrais aussi vous répondre que vous y allez fort ».

Une enquête « bénévole » sur le financement illégal des partis politiques

Mardi, Jacques Duchesneau a révélé qu'après avoir quitté l'UAC l'automne dernier, il a continué d'enquêter de manière « personnelle et bénévole » sur la façon dont les partis politiques sont financés par des constructeurs et des firmes de génie-conseil.

Poursuivant son témoignage devant la commission d'enquête sur l'industrie de la construction, M. Duchesneau a révélé qu'il a rencontré 13 témoins sur une période de quatre mois suivant son départ de l'UAC. Il dit avoir reçu plusieurs informations dans la foulée de son témoignage en commission parlementaire l'automne dernier.

« Pour ces personnes, il existerait un système de combines au Québec. Le financement populaire des partis politiques, pour eux, ça n'existerait pas. Tout l'argent amassé proviendrait de manigances, de stratégies de complaisance et d'arrangements », a-t-il affirmé.

« Dans le premier rapport, on vous a [dit] que oui, il y avait du financement, mais qui était plus du push, c'est-à-dire que des firmes d'ingénierie ou des entrepreneurs en construction pousseraient l'argent vers le haut », a-t-il relaté.

« Ce que j'ai appris dans les quatre derniers mois, quand j'ai rencontré ces témoins, c'est qu'on est plus dans une politique de pull: c'est-à-dire que les gens qui sont en fonction d'autorité demandent de l'argent aux firmes de génie et aux entrepreneurs en construction », a-t-il poursuivi.

« Le système est bien ancré. On [dit] par exemple que 70 % de l'argent consacré aux partis politiques au provincial ne serait pas issu de dons officiels enregistrés. C'est-à-dire qu'il y a de l'argent sale qui permet de faire des élections. [Aussi], 65 % des pots-de-vin sont aussi là pour engraisser non pas les partis politiques, mais les gens qui font de la politique, notamment par le biais de cocktails de financement », a affirmé M. Duchesneau.

« Le directeur général des élections du Québec était parfaitement au courant des personnes que je rencontrais et je lui faisais rapport », a encore dit M. Duchesneau.

Le rapport d'une cinquantaine de pages de M. Duchesneau, qu'il a intitulé Le financement illégal des partis politiques, un système hypocrite où l'influence est à louer, où les décisions sont à vendre, porte aussi sur le financement des partis politiques municipaux.

« On m'a aussi parlé qu'il y aurait des cotes répandues, notamment au niveau municipal. Pour obtenir des contrats, on doit donner à des partis municipaux. Que les élections clés en main, ce n'est pas une lubie, ça existe. Des firmes de génie, des firmes de comptables, des firmes d'avocats [...] aident des gens à être élus au niveau des élections municipales », a-t-il déclaré.

« Pour maquiller cette façon de passer de l'argent, on tient habituellement deux comptabilités : une officielle, qu'on remet au directeur général des élections, mais une plus secrète, qui sert autant à financer les partis politiques qu'à financer des gens qui sont en politique », a-t-il ajouté.

« La fausse facturation est aussi un des moyens pour collecter de l'argent », a encore dit Jacques Duchesneau. Selon lui, pas moins de 50 entreprises de la seule région de Montréal font de la fausse facturation.

Le rapport que M. Duchesneau a écrit bénévolement sera remis à la commission Charbonneau, mais ne sera pas déposé en preuve. Le public ne pourra donc pas le consulter sur le site Internet de la commission.

Un article de François Messier

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