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L'histoire du Web regorge d'incidents causés par un «répondre à tous» malheureux

Web : des «répondre à tous» malheureux
Getty Images

TORONTO - John Levine a littéralement écrit la «bible» en anglais sur les courriels, et il n'a donc pas été particulièrement étonné d'entendre parler de la gaffe «répondre à tous» qu'aurait commise récemment le ministre fédéral de l'Immigration, Jason Kenney.

Près de 40 ans après l'envoi du premier courrier électronique, les gens peinent toujours à utiliser le service correctement et à éviter de malencontreuses erreurs.

«Nous essayons encore de comprendre les normes sociales, ce qui est acceptable, la bonne manière de l'utiliser, et la mauvaise», a dit M. Levine, qui a écrit le premier «Internet pour les nuls» en 1993, puis «Courriel pour les nuls» en 1997, et qui a été consultant pour Industrie Canada.

«Mon message le plus important: je n'ai jamais regretté de ne pas avoir envoyé un message impoli. Même avec toutes les précautions du monde, même si vous l'envoyez exactement à la bonne personne, la malfaisante petite 'fée des courriels' va agiter sa baguette devant vos yeux juste assez longtemps pour que vous appuyiez sur le mauvais bouton, et c'est parti ! Nous avons tous vécu ça.»

Le ministre Kenney aurait répondu à un courriel portant sur une éventuelle rencontre avec le vice-premier ministre de l'Alberta, Thomas Lukaszuk, en le traitant de «trou de cul complet et total». Mais au lieu d'être envoyé à une seule personne, le courriel aurait été transmis à de nombreux utilisateurs et aurait finalement été rendu public.

Pour plusieurs, une gaffe «répondre à tous» pourra servir de leçon quant à la rédaction de propos qu'on ne peut ensuite récupérer.

«Souvent, quand j'écris un message, je m'arrête et je réalise que j'ai besoin de réfléchir. Si quelqu'un n'a pas tout le contexte que j'ai en tête, quel sens donnera-t-il à mon courriel? Et ce n'est souvent pas ce que je veux exprimer», a dit M. Levine.

Mais même ceux qui ont déjà péché ne sont pas complètement sortis du bois, prévient-il. «C'est en partie attribuable à l'interface pitoyable de plusieurs logiciels de courriels. Et c'est en partie dû au fait que parfois, il est logique de répondre à une seule personne, et parfois à tous. C'est essentiellement le même problème que chuchoter quelque chose à quelqu'un sans réaliser qu'un micro est ouvert et que tout le monde peut nous entendre.»

Engorger le réseau

Le clic «répondre à tous» peut aussi causer des problèmes que de simples excuses ne pourront régler. Dans les cas les plus graves, l'intensité des échanges entre tous pourra engorger le réseau d'une entreprise. Une telle éclosion de courriels attribuable à un usage exagéré du bouton «répondre à tous» porte même un nom: «tempête de courriels».

En 1997, Microsoft a été frappée par une telle tempête de catégorie 5 quand un employé appartenant à une liste d'envoi comptant 13 000 membres a demandé à en être désabonné. Malheureusement, il a envoyé sa requête à tous les membres, tout comme d'autres qui ont reçu son message et qui ont décidé, eux aussi, de quitter la liste.

Arrivèrent ensuite les messages mesquins demandant aux membres de ne pas utiliser la fonction «répondre à tous» — dont ils faisaient eux-mêmes par-là usage —, et les envois des petits plaisantins qui ont décidé que c'était le meilleur moment pour partager leur bonne blague avec tous les collègues.

Les spécialistes de la technologie de l'information chez Microsoft ont assisté, impuissants, à la circulation de ces messages, jusqu'à ce que les serveurs s'écroulent. Décompte final: 1,5 million de courriels envoyés en moins d'une heure, représentant 195 gigaoctets de données.

Il a fallu deux jours d'efforts pour remettre le système sur pied.

En 2007, le département américain de la Sécurité intérieure a vécu une situation similaire quand un individu abonné à une liste comptant 7500 membres a demandé à en être désabonné. Selon le quotidien New York Times, l'utilisation du «répondre à tous» a donné naissance à 2,2 millions de messages, dont de nombreuses répliques humoristiques.

«Puisque nous en sommes aux présentations: je m'appelle Steve, et j'aime les longues marches sur la plage et un bon chardonnay avec mon canard rôti. LOL», a écrit un comique improvisé.

«Puissent les puces d'un millier de chameaux infester vos aisselles», a répondu à tous — évidemment — un autre usager frustré.

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