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Le Barreau critique le projet de loi spéciale du gouvernement Charest

«Une atteinte aux droits constitutionnels et fondamentaux», selon le Barreau
CP

Le projet de loi spéciale visant à mater la contestation étudiante qui est actuellement à l'étude à l'Assemblée nationale porte atteinte « aux droits constitutionnels et fondamentaux des citoyens », estime le Barreau du Québec.

« J'estime que ce projet de loi, s'il est adopté, porte des atteintes aux droits constitutionnels et fondamentaux des citoyens. L'ampleur de ces limitations aux libertés fondamentales n'est pas justifiée pour atteindre les objectifs visés par le gouvernement », souligne le bâtonnier du Québec, Me Louis Masson.

Dans un communiqué publié vendredi matin, l'ordre professionnel des 24 000 avocats du Québec se dit notamment préoccupé par :
  • les limitations apportées au droit d'association et au droit de manifestation;
  • la judiciarisation des débats et le recours à la justice pénale prévus dans le projet de loi;
  • les sanctions financières sévères imposées aux associations;
  • le renversement du fardeau de la preuve qui rend les associations d'étudiants et les syndicats responsables d'actes commis par autrui;
  • les pouvoirs accrus octroyés au ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport.

« Plusieurs dispositions du projet de loi portent atteinte au principe de la primauté du droit, laquelle exige, dans un effort de proportionnalité, que l'on n'écarte les règles du droit commun qu'en présence d'une justification convaincante. Je crains toutefois que ce projet de loi ne permette pas d'atteindre ces objectifs et porte atteinte à nos droits fondamentaux », indique le bâtonnier.

Selon le Barreau, les dispositions exigeant que les organisateurs des manifestations de 10 personnes ou plus dévoilent leur itinéraire et leur mode de transport aux policiers au moins huit heures avant le début de la manifestation « sont contraires à la liberté d'expression ». Il en va de même de la disposition qui permet aux policiers d'ordonner un changement de lieu ou d'itinéraire aux manifestants.

« Le gouvernement rend plus difficile, par exemple, l'organisation de manifestations spontanées. Il limite la liberté d'expression. Cette disposition s'applique à toute personne, organisme ou groupement et prévoit même que les personnes qui participent à une manifestation, sans l'avoir organisée, doivent s'assurer que l'événement correspond aux renseignements fournis à la police. On est en droit de se demander qui osera encore aller manifester », précise Me Masson.

Le Barreau soutient en outre que le principe de liberté d'association sera limité par les amendes salées qui pourront être imposées aux associations étudiantes dans les cas où il serait impossible pour les établissements d'enseignement de dispenser des services en raison d'actes qui leur seraient attribuables. Cette approche, craint-il, pourrait « porter atteinte à la survie de ces associations étudiantes ».

Le Barreau soutient en outre que Québec s'écarte des règles du Code civil en légiférant de manière à rendre les associations d'étudiants et les syndicats responsables d'actes commis par autrui, ce qui constitue un renversement du fardeau de la preuve.

« Une association ou une fédération peut être rendue responsable d'actes de personnes avec qui elle n'a aucun lien. Par exemple, des manifestants provenant d'un autre établissement ou d'autres réseaux », déplore le bâtonnier Masson.

« Les associations d'étudiants et les syndicats ne sont pas les employeurs de leurs membres et ne possèdent pas de pouvoir de contrainte sur eux », ajoute-t-il. « Il est donc contraire aux principes de base de la responsabilité civile de les rendre responsables des actes d'autres personnes sans que l'on ait prouvé leur participation réelle aux actes fautifs ».

Le Barreau dénonce également que le projet de loi spéciale accorde à la ministre de l'Éducation le pouvoir d'ordonner aux établissements de cesser de percevoir la cotisation fixée par une association. Il s'agit là, dit Me Masson, de « pouvoirs qui sont supérieurs à ceux de l'Assemblée nationale, puisque le projet de loi prévoit, notamment, que le ministre pourra par décret, sans passer par l'Assemblée nationale, écarter l'application de lois ou de règlements ».

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